Yann FERGUSON, directeur scientifique à Inria, note que l’adoption de l’intelligence artificielle (IA) au travail connaît une dynamique singulière, marquée par l’initiative directe des salariés. Contrairement aux premiers usages, où moins de 1 % des initiatives étaient le fait des salariés, aujourd’hui, près de 50 % des utilisateurs adoptent l’IA de manière autonome, souvent en dehors du contrôle de leur employeur. Une statistique révélatrice : 55% des salariés français qui utilisent l’IA ne l’ont pas signalé à leur manager. Les usages de l’IA montrent un intérêt équilibré pour deux axes : la productivité et la créativité. Là où les précédentes révolutions technologiques ciblaient principalement des tâches à faible valeur ajoutée, les utilisateurs exploitent désormais l’IA pour des tâches complexes et à forte valeur. Cette réalité pose une question fondamentale : la création de valeur de l’IA relève-t-elle uniquement de l’employeur ou peut-elle être pilotée par les salariés eux-mêmes ? Les expériences passées apportent un début de réponse. De nombreux produits basés sur l’IA ont été optimisés grâce aux retours des utilisateurs, qui ont spontanément exploré leurs usages pour en tirer le meilleur. L’autre différence majeure avec les solutions d’automatisation traditionnelles est l’intensité de la coopération entre l’humain et la machine. Les modèles d’IA générative actuellement disponibles présentent cependant des limites notables. Par exemple, un benchmark récent, publié le 30 octobre dernier, indique que la meilleure solution du marché atteint 47 % de vérité. Cette caractéristique fondamentale implique que l’IA ne peut pas garantir la véracité de ses réponses. Face à cette limite, la capacité humaine à développer un sens critique devient un facteur clé. Le dernier kilomètre, celui qui transforme la vraisemblance en vérité, repose sur des compétences humaines telles que l’analyse critique et la capacité à vérifier les informations. Cependant, plusieurs études soulignent que ces compétences sont insuffisamment enseignées, notamment dans le système éducatif. Les enseignants, pensant souvent que l’apprentissage des méthodes scientifiques suffit à forger un esprit critique global, se heurtent à une réalité différente. Ces compétences doivent faire l’objet d’un enseignement structuré dans toutes les disciplines pour être réellement acquises. Ainsi, le recours massif à l’IA générative convoque une compétence critique que les collaborateurs doivent mobiliser, bien qu’elle reste partiellement développée. Cette exigence révèle un défi pour les entreprises, qui doivent accompagner leurs salariés dans l’acquisition de cette compétence afin de maximiser la valeur et la fiabilité des usages de l’IA dans leurs activités quotidiennes. Digiworld Institute Summit 2024
Merci de cette analyse très intéressante. Ce qui serait réjouissant, c’est que l’usage de toute fonction IA indique l’énergie qui va être consommée, son mix et son coût carbone/€. Cela permettrait à chacun d’être juge de la « valeur » de son action. Et d’orienter les modèles de l’IA vers des méthodes sobres (ex: apprentissage par renforcement). Ce qui inviterait aussi les utilisateurs à se former vraiment sur le « comment fonctionne l’IA » et pas juste à être des consommateurs.
Merci. Pour avoir un exemple de déploiement réussi, couvrant ces thèmes et répondant à beaucoup de ces interrogations, je conseille le replay du très bon webinaire de Labor IA, mettant en avant l’expérience d’ENEDIS par Aude Vinzerich, PhD avec Yann FERGUSON. https://www.laboria.ai/webinaire-laboria-explorer-decembre-2024/
Chère confrère Nathalie AYET, notre programme des 6C, basé sur l’acquisition de méta-competences dont la pensée critique au service d’une prise décision éclairée en environnement complexe, a de beaux jours devant lui!!!🤓
Merci pour votre instructif et excellent partage.
Excellente analyse de la différence
Impressionnant Nicolas MARIOTTE ! J’aurais été ravi de vous croiser, étant un lecteur attentif de vos posts!
Analyse très intéressante! Merci pour ce partage
Yann FERGUSON merci pour ce partage.
Whaouh, quel post !! Tellement complet, et lucide. Pas étonnée que ce soit inspiré par Yann FERGUSON à faire lire à bcp. Merci 🙏
Enseignant-chercheur (USPN - Iris) Médecin (AP-HP)
3 j.L’adoption et l’utilisation des moteurs de recherche type Google au sein de l’entreprise ont elles vraiment suivi une autre trajectoire, en ce qui concerne l’usage d’interrogation en particulier ?